Téléphonie en Allemagne
Des associations qui peinent à sensibiliser les consommateurs
Dans nos sociétés où émettent continuellement 1,5 millions d’antenne-relais et leurs réseaux cellulaires, des centaines de milliers de bornes Wi-Fi, des micro-ondes et des radars, la multiplication des cancers pourrait avoir trouvé une explication. Pourtant, avez vous vu qui que ce soit délaisser son téléphone portable ces derniers jours par peur de risquer un cancer ? Probablement pas. Ce « potentiellement » cancérigène manque de poids, et pour cause, les téléphones mobiles sont classés dans la même catégorie que le café ou certaines laines de verres dont on ne connaît pas les risques pour l’homme. Ceci étant dit, en Allemagne comme en France des associations se développent depuis quelques années pour tenter de sensibiliser le public au danger de ce qu’on appelle ici «Elektrosmog », terme désignant la pollution électromagnétique engendrée par tous ces appareils.
A Stuttgart, l’association Bürgerinitiative West lutte depuis 2006 contre l’explosion de l’industrie des téléphones mobiles au détriment de la santé publique. Elle s’engage tout spécialement pour la protection des plus jeunes, cibles les plus sensibles aux ondes électromagnétiques en dénonçant une « atteinte légalisée à la santé de nos enfants ». Les antennes-relais sont leur cible principale, avec des évènements organisés où ils ont par exemple accroché des ballons sur nombre d’entre elles pour qu’on les remarque plus, avant de sensibiliser la population au danger qu’elles représentent. Cette association devient de plus en plus influente, de même que l’association française Robin des Toits qui revendique la désactivation des Wi-Fi publics, notamment ceux des écoles et des collèges, au profit d’un réseau de très haut débit filaire. Pour l’instant sans résultat. En Allemagne la mentalité évolue peu à peu et on a pu observer dans le Bild de nombreux témoignages comme celui d’Ingelore Ninhaus, 47 ans, femme au foyer : « Ce problème me préoccupe de puis longtemps déjà. C’est bien connu que le nombre de tumeurs chez les enfants qui ont un téléphone portable est en constante augmentation. Ma fille de 12 ans n’a donc pas encore de portable. Moi je m’en sers rarement, et toujours avec un kit main-libre pour les longs appels. »
La même vague de peur des ondes a frappé nos voisins européens ces dernières années, où des réglementations limitant le développement des antennes relais sont apparues en Belgique et en Espagne en 2009.
une antenne-relais du réseau GSM |
Le bilan de l’OMS jugé trop flou
L’Allemagne, classée 8ème mondial en nombre de téléphones portables et 5ème en nombre de bornes Wi-Fi, compte plus de téléphones mobiles que d’habitants, ce qui n’est pas encore le cas de la France mais le sera bientôt. Malgré cela, dans aucun des deux pays les médias n’ont eu de réaction remarquable à ce rapport l’OMS attendu depuis dix ans, et tous deux semblent prêts à attendre dix années de plus pour découvrir l’ampleur des conséquences de l’exposition aux ondes électromagnétiques. A qui la faute alors ? Les preuves scientifiques ne sont certes pas catégoriques, mais nul ne veut répéter l’erreur réalisée avec l’amiante ou le radium qui ont contaminé énormément de monde avant qu’on ne réalise leur toxicité. Les géants de la téléphonie mobile génèrent des bénéfices tels qu’ils ne vont certainement pas encourager le débat sur la question. A noter pourtant, ils financent certaines recherches scientifiques sur les effets des ondes électromagnétiques sur l’homme – pas celle du CIRC en l’occurrence.
M. Walls, vice président de la CTIA Wireless Association – une référence dans le domaine des technologies nomades – critique les résultats proposés par le CIRC : « L’étude réalisée par le groupe de travail du CIRC n’est en rien nouvelle, il s’agit d’un simple rassemblement de données déjà connues et publiques. […] Ils n’ont apporté aucune preuve scientifique comme quoi l’usage de téléphones portables seraient une cause de cancer. » Quant au site spécialisé www.inside-handy.de, il n’a publié qu’un court communiqué soulignant le caractère incertain des résultats, et l’incertitude quant aux effets à long terme.
Les résultats confirment pourtant qu’on est au devant d’un risque réel. Mais OMS ou non, à l’heure actuelle personne ne semble prêt à se séparer de son téléphone mobile, et la sentence d’un rapport scientifique dénonçant cinq milliards d’appareils comme « potentiellement » cancérigènes n’a pas été le choc qu’on aurait pu attendre.
Mathias Mezard
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